Les origines du B-2 Spirit remontent à la fin des années 1970, lorsque le Pentagone commença à s’intéresser aux technologies de furtivité. Le constructeur Northrop travaillait à l’époque secrètement sur un projet de bombardier furtif nommé Tacit Blue, tandis que Lockheed développait de son côté le projet Have Blue, qui aboutira quelques années plus tard au F-117 Nighthawk.
En septembre 1980, peu après l’arrivée au pouvoir de l’administration Reagan, le Pentagone choisit Northrop, en partenariat avec Boeing, pour le développement d’un projet de bombardier furtif avancé, sous le nom de code ATB : Advanced Technology Bomber. Le concept d’aile volante semblait être le plus approprié pour réduire la signature radar d’un avion, et Northrop possédait déjà une expérience dans ce domaine, avec les Northrop N-1M, N-9M et YB-35 dans les années 1940.
Le développement de l’appareil se fit dans le plus grand secret jusqu’en 1988. Northrop et le Pentagone étant légalement obligés de communiquer sur le développement d’un projet de grande envergure, ils publièrent le moins de détails possible. Le financement de l’ATB fut désigné sous le nom de code « Aurora ». Enfin, en novembre 1988, le 1er prototype AV-1 effectua son premier roulage au sol, devant un public tenu à distance, suivi le 17 juillet 1989 du premier essai en vol, à la base d’Edwards AFB, en Californie.
Le B-2 Spirit est une grande aile volante en forme de « W », sans aucune surface verticale ni entièrement plane. Son instabilité aérodynamique le rendant impossible à piloter manuellement, il est doté d’une assistance électronique avec 4 circuits redondants. Sa structure est composée à 80% de matériaux composites, notamment du titane, du carbone et de l’epoxy. Les réacteurs sont profondément intégrés dans la structure, afin de réduire la signature infrarouge des gaz d’échappement, et de l’acide est injecté à l’arrière des tuyères pour éviter la formation de traînées de condensation. La peinture sombre utilisée contribue à la furtivité grâce à des propriétés d’absorption des ondes radar et des émissions infrarouges. De plus, le nombre de rivets et de panneaux d’accès a été réduit au minimum afin de limiter les aspérités détectables au radar. Pourtant, des défauts de furtivité ont été découverts en 1991, vis-à-vis de radars au sol de dernière génération, et de certains missiles russes tels que le SA-10 Grumble et le SA-12 Gladiator.
Le B-2 est capable de remplir des missions de bombardement stratégique conventionnelles ou nucléaires, pouvant emporter jusqu’à 22 680 kg d’armement dans ses deux soutes latérales, éventuellement montés sur lanceurs rotatifs. Il peut délivrer une large panoplie de bombes conventionnelles, lisses ou guidées (par exemples 80 bombes Mk.82), ainsi que des missiles de croisière. Il peut également emporter jusqu’à 16 têtes nucléaires : bombes B83 (jusqu’à 1,2 mégatonne), bombes B61 (jusqu’à plusieurs centaines de kilotonnes) et missiles B61-11.
Le cockpit accueille un pilote et un copilote, assis sur des sièges éjectables ACES II, et peut accueillir un troisième membre d’équipage pour les missions longues. Le Spirit jouit d’une réputation d’appareil agréable à piloter, et est particulièrement réactif à l’augmentation de la poussée des réacteurs, grâce à sa trainée minimale. Son rayon d’action se situant autour de 12 000 km sans ravitaillement en vol, il peut atteindre littéralement n’importe quel point du globe en une mission avec ravitaillement.
Pourtant, lors que le programme ATB prévoyait initialement une commande de 132 appareils, le coût exorbitant du développement du B-2 a incité le Congrès à revoir les volumes drastiquement à la baisse, surtout après la chute de l’Union Soviétique. Actuellement, 21 appareils sont en service opérationnel, pour un budget de maintenance annuel de 700 millions de dollars. Au total, le programme B-2 a coûté aux Etats-Unis 44,78 milliards de dollars, soit un prix unitaire de 2,13 milliards de dollars (2 à 3 fois son poids en or). Aucun production de B-2 supplémentaire n’est planifiée.