Un document en ligne intéressant qui expose la vision du PDG de la firme de Blindés Nexter.
Compte rendu Commission de la défense nationale et des forces armées
— Audition, de M. Philippe Burtin, PDG du groupe Nexter, sur la dimension industrielle du Livre blanc sur la défense et la sécurité
nationale.
4 décembre 2012
Compte rendu
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Mme la présidente Patricia Adam.
Je souhaite la bienvenue à M. Philippe Burtin, PDG du groupe Nexter, entreprise
que les membres de notre commission connaissent bien.
Spécialisée dans le domaine de l’action terrestre, c’est en
core l’une des rares grandes structures détenues intégralement par l’État.
M. Philippe Burtin, PDG du groupe Nexter.
À 100 %, en effet.
Mme la présidente
Patricia Adam.
Ceux qui parmi nous ont pu assister aux démonstrations de l’armée de terre à Carpiagne ont pu voir en action le canon CAESAR, le
véhicule de l’avant blindé (VAB) ou, encore, le véhicule blindé de combat d’infanterie
(VBCI). Les plus anciens commissaires, en par ticulier, n’ignorent rien de ces matériels.
Dans le cadre du nouveau Livre blanc, monsieur le pr
ésident, nous souhaiterions connaître vos attentes et votre vision quant à
l’industrie de défense terrestre en France mais, également, en Europe.
M. Philippe Burtin, PDG du groupe Nexter.
Je suis très honor é d’être devant vous aujourd’hui et je vous remercie d’avoir bien
voulu recueillir mon avis sur la dimension
industrielle de la mise à jour du Livre blan
c sur la défense et la sécurité nationale.
Alors que les menaces restent très présentes et se manifestent sous des formes
changeantes et que la compétition se renforce à l’international ou en Europe avec l’ouverture
des marchés, il importe que la représentation nationale soit informée de la situation de son
industrie et, plus particulièrement , dans le secteur de la défense
terrestre, de ses forces, de ses difficultés et de ses enjeux.
En premier lieu, je souhaite vous parler du groupe Nexter, entreprise
leader de la défense terrestre en France.
La phase la plus difficile de la restructuration est terminée depuis 2006. Le groupe
Nexter, qui a été créé à cette époque-là, demeure en effet détenu à 100 % par l’État via la
société holding Giat Industries, que je préside.
En cette fin d’année 2012, les faits attestent du retour du groupe parmi les acteurs mondiaux qui comptent dans
le secteur de la défense terrestre. Nexter est l’héritier de 250 ans de
traditions, de compétences et de savoir dans ce
domaine : les armes, les munitions , les blindés et, plus générale
ment, les systèmes de défense sont notre patrimoine.
Le partage des rôles voulu par l’État a conduit à placer dans
notre portefeuille d’activités tous les équipements et services hors le petit calibre
- depuis 1998 -,
le mortier, les véhicules légers et les camions. C’est dans ce cadre que, pour ce qui est du passé récent, les
systèmes d’armes les plus emblématiques qui équipent les forces ont été conçus comme, par
exemple, le char Leclerc, l’AMX 10 RC, les 4 000 VAB, qui ont été produits dans notre
établissement de Saint-Chamond.
La mutation du groupe a été majeure, surtout dans sa dernière phase. Nous avons
parlé, à juste titre, d’une refondation, terme qui caractérise le travail en profondeur que nous
avons mené sur les processus, l’organisation,les systèmes d’information, les relations
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sociales, la culture, l’image, en parallèle de tout ce qui a été plus médiatisé et, en particulier,
notre format industriel ainsi que notre potentiel de ressources humaines.
Avec l’appui constant de l’État, que je salue tant il a été déterminant dans la réussite
de cette transformation, et tout en mainte
nant le consensus dans la communauté des personnels convaincue de l’urgence de ce changement en dépit des difficultés inhérentes à une
telle situation, nous nous sommes transformés en
une société de 2 700 salariés – nous étions 14 000 en 1990 –, mobilisée autour de sa mission
qui est d’apporter les matériels et services les meilleurs et les plus compétitifs aux forces
de notre pays comme aux forces des autres pays clients.
Avec un chiffre d’affaires qui s’établit actuellement entre 800 millions et
1,1 milliard, le groupe Nexter dispose d’une offre produits/services qui inclut aujourd’hui les
systèmes blindés moyens et lourds, à chenilles et à roues - dont l’Aravis et le VBCI -, les
systèmes d’artillerie avec le CA ESAR, le Trajan – retour dans le matériel tracté de 155 mm –
et le canon de 105 mm, les armes et tourelles avec les armes du Rafale et du Tigre, le
Narwhal, qui équipe les FREMM, l’ARX 20, les munitions de moyen calibre - dont le 40 mm,
que nous développons avec nos amis anglais - et de gros calibre. Tout ceci est complété par
les services, tel le MCO, mais aussi les systèmes de systèmes, les systèmes d’information
tactique, la robotique et les équipements associés. Il s’agit d’un porte feuille large pour une
société qui se veut un acteur global.
(...)Nous avons ga
rdé notre implantation dans dix
territoires en France, avec un
dimensionnement allant de trente à quarante salariés jusqu’à un peu plus de 800 pour le site le
plus important, à Roanne. Ces sites sont spécia
lisés soit sur un segmen
t de marché, soit sur
une activité industrielle spécifique
et leurs moyens, dès 2006, ont été mis en stricte adéquation
avec les missions qui leur sont données.
Française, la société l’est au
ssi par son effectif, localisé
en métropole à 98 %, et par
ses achats dont 92 % du volume est dirigé vers
les entreprises de not
re pays. Parmi nos
1 400 fournisseurs, 850 sont des PME. Pour faire
face à sa charge, en oc
tobre dernier, Nexter
avait déjà embauché 44 salariés sur sa cible
de 90 recrutements en 2012, dont 28 apprentis.
(...)
Il est utile de dire un mot
sur notre métier. Dans les années 90, nous étions un
manufacturier ; nous avons maintenant l’habitu
de de nous définir en tant que systémier-
intégrateur de la défense terrestre afin de
souligner que le centre de gravité du groupe est
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aujourd’hui dans les systèmes d’armes intégrés
, tout en gardant en propre les compétences
d’études, d’ingénierie et de production des
composants, plateformes et armements dont nous
jugeons essentielle la maîtrise pour garantir la
permanence de notre offre et la performance de
nos systèmes.
En parallèle, le secteur terrestre de la
défense – et c’est un
des points de débat du
Livre blanc – reste une industrie de souverain
eté qui contribue à l’
autonomie d’action des
forces et du pays. À ce titre,
l’industriel français de la défe
nse terrestre que nous sommes se
doit de garder les capacités de conception, pr
oduction et maintien en condition opérationnelle
qui permettent le moment venu l’indépendance
pérenne des forces engagées. Notre modèle
industriel, décidé en 2003, a bien sûr préservé
cette capacité souveraine en termes d’armes et
de munitions tout en la dimensionna
nt à son juste équilibre économique.
La liberté du maître d’œuvre est de concevoi
r et de spécifier le matériel qui répond
au besoin du client dans le cadre de compétitiv
ité déjà souligné. Pour cela, il est nécessaire -
j’y insiste - qu’il garde toute liberté en matière d’architecture et, sans être bridé par une
préférence ou une exclusivité, qu’il recherche en
interne ou en externe les solutions et les
composants les plus adéquats qui permettront
de définir cette solution technique – matériel,
service – dans la limite des engagement
s qu’il a pris vis-à-vis de son client.
L’exemple du CEASAR que nous avons conçu sur fonds propres à partir de 1992 est
à cet égard emblématique. Les premiers prototype
s ont été conçus et testés avec l’industriel
alsacien Lohr Industries sur
base Unimog, c’est-à-dire, Mer
cedes. Cette image de marque
allemande a sans doute contribué au choix de
cette solution par un client du Moyen- Orient,
avec le nombre le plus importa
nt de CAESAR – 132 – commandé
s à ce jour. La France, pour
sa part, a préféré la solution du groupe Volvo, or
ientant le choix de deux pays clients d’Asie,
l’Indonésie et la Thaïlande.
Nexter se prépare pour soumissionner en
2013, en Inde, pour un matériel du type
CAESAR et discute avec les four
nisseurs indiens de solutions de châssis afin de satisfaire aux
exigences de compensation. Nous aurons donc à
choisir, le moment
venu, entre Tata, Ashok
Leyland, BEML ou Eicher. Une autre solution de
mobilité pour le CAESAR est en cours
d’examen avec une société brésilienne qui
a déjà travaillé sur un châssis tchèque.