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 La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées

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helios
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helios


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MessageSujet: La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées   La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées Icon_minitimeDim 28 Déc - 21:46

Citation :
Bonjour. Il y a longtemps que je n'ai pas posté sur le forum, mais voici un article intéressant à lire.
Il y (comme toujours) un parti pris, mais l'article est très instructif. Je donne le lien du site dans le message qui suivra.
Bonne lecture
LA GEOPOLITIQUE et d’autres notions proches sont souvent utilisées depuis plusieurs années tant dans la science mondiale des relations internationales que dans la science polonaise. On peut dire que faire référence à la géopolitique est devenu une mode scientifique contemporaine. En conséquence, ces notions sont devenues une partie intégrante de l’étude des relations internationales. Cependant, le manque de définitions des relations et interdépendances mutuelles entre ces notions entraîne un chaos dans une grille des concepts portant préjudice à la science des relations internationales contemporaine. Pour mieux appréhender ces problèmes, il faut d’abord expliquer : la genèse, l’évolution, les raisons de la renaissance de la géopolitique et sa perception d’aujourd’hui.
1. La genèse, l’évolution et les raisons de la renaissance de la géopolitique

Pour ne pas s’étendre sur l’origine de la géopolitique l’on peut dire qu’elle s’est développée rapidement au début du XXème siècle pour ensuite retomber spectaculairement après la Deuxième Guerre mondiale. Associée à l’impérialisme allemand, la géopolitique tombe dans l’oubli. Cette opinion a été confirmée par la conférence des historiens français et allemands réunie à la Sorbonne en 1945. Ils décidèrent d’exclure la géopolitique du programme universitaire. L’intérêt pour la recherche sur la géopolitique revient à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Cette redécouverte de la géopolitique résulte de la combinaison des paramètres suivants :

A. L’affaiblissement de la « Guerre froide » et l’apparition de contradictions dans les deux camps idéologiques :

. dans le camp occidental, la fissure est apparue dès les années 1960. Le Général de Gaulle, qui fondait la politique étrangère de la France sur une pensée stratégique propre, a nié la logique des blocs idéologiques et politico-militaires. Le symbole de cette politique était cette célèbre expression : « L’Europe de l’Atlantique à l’Oural ». Les décisions politiques ont suivi la stratégie gaullienne : l’acceptation du statu quo territorial en Europe, la reconnaissance diplomatique en 1964 de la République Populaire de Chine, la sortie de la France de la structure militaire intégrée de l’OTAN, le début de la nouvelle politique à l’Est ;

. un autre message de l’émancipation des Etats du bloc occidental est le début en 1969 de l’Ostpolitik de la République Fédérale d’Allemagne, c’est-à-dire l’ouverture du dialogue et en conséquence la signature des accords avec l’Union soviétique, la Pologne, la Tchécoslovaquie et la régulation du statut de Berlin ;

. dans le camp communiste, le signal de sa décomposition est l’accroissement, à partir du début des années 1960, de l’hostilité entre l’Union soviétique et la Chine dans le cadre de la lutte pour la domination en Asie et dans le Tiers monde. Dans ce contexte, la notion « géopolitique » apparait dans la langue des médias de masse pendant le conflit vietnamo-cambodgien en 1978-1979. C’est à cette époque que pour la première fois, l’enjeu territorial (le contrôle d’une partie du delta du Mékong) est plus pesant que la cohésion du camp communiste ;

. le processus de naissance de la conscience de l’identification politique des nations et des Etats : la révolution islamique iranienne en 1979, la création en Pologne de « Solidarité » ;

. la signification grandissante des notions d’« espace » et de « territoire » qui sont des concepts centraux de la géographie.

B. La fin du monde bipolaire :

. l’improductivité du système économique communiste et l’impossibilité d’égaler dans l’armement le niveau des Etats-Unis ; les échecs en Afghanistan au milieu des années 1980 provoquent des essais de réformes en Union soviétique (perestroïka et glasnost). L’émancipation politique des Etats du camp soviétique prend de l’ampleur ;

. l’année 1989 fut décisive pour la « réanimation » de la notion de « géopolitique ». A cette époque-là se sont produits les événements suivants : la création pour la première fois dans le Bloc soviétique d’un gouvernement non-communiste et la destruction du mur de Berlin. En conséquence, on a observé la destruction de l’Union soviétique en 1991 et la création de l’Etat de Russie et d’autres Etats post-soviétiques notamment via la Communauté des Etats indépendants (CEI) ;

. on a compris l’importance des conflits jusque-là« gelés » par le système bipolaire, c’est-à-dire les conflits territoriaux, ethniques, religieux et culturels qui ont induit le phénomène de « balkanisation » du monde ;

. la guerre du Golfe a mis en évidence le poids politique de cette région ;

. le processus continu de la globalisation économique et culturelle a introduit le problème d’une tension entre homogénéisation et hétérogénéisation du système international.

C. La révolution informatique qui facilite la communication et la croissance de l’identification géopolitique des nations.
2. L’état des lieux des études sur la géopolitique

Cette tâche est difficile, même si nous limitons nos recherches à l’époque post-Guerre froide. Le premier obstacle résulte de l’inflation d’ouvrages sur la géopolitique qui traitent souvent cette notion avec des approches exotiques [1]. Les sujets de ces ouvrages peuvent se regrouper autour de quelques groupes.

Depuis plusieurs années, on observe la croissance de l’importance de la géopolitique en Russie.

Le premier de ces groupes, le plus important, concerne la présentation de régions géographiques définies, caractérisées par l’analyse des facteurs qui sont – selon les auteurs de ces analyses – les traits essentiels de la géopolitique. Les différences entre ces ouvrages consistent dans l’échelle de la région présentée. D’après ce critère, nous pouvons distinguer des ouvrages qui traitent le monde entier sous l’angle du centre de pouvoir, la région interétatique géographique, les régions définies de l’Etat et même les quartiers de la ville. On peut inclure dans ce groupe les ouvrages qui depuis quelques années traitent de l’espace cosmique. Le trait caractéristique de la majorité de ces ouvrages est l’absence d’explication relative à la raison pour laquelle ces auteurs écrivent de la géopolitique plutôt que des relations internationales ou de la géographie politique.

Le deuxième groupe est formé par les ouvrages qui analysent la position, le rôle et la stratégie politique de l’Etat dans le milieu international et le changement de cette position, son rôle et sa stratégie dans le temps et l’espace. Le plus souvent, les auteurs de ces ouvrages s’occupent des Etats puissants des relations internationales. Il existe aussi un grand nombre d’ouvrages qui concernent des Etats moins importants. Les auteurs de ce groupe assimilent souvent les notions de « politique étrangère » et de « défense de l’Etat » à celle de géopolitique ou de géostratégie. Ce groupe d’auteurs répond au caractère de la discipline méthodologique de l’approche géopolitique.

Le troisième groupe rassemble les ouvrages qui traitent des domaines particuliers des relations internationales et de l’approche géopolitique. Le sujet de ces ouvrages est très différent. Ces dernières années, le sujet principal de ces œuvres est la problématique des ressources énergétiques. On peut distinguer d’autres thèmes géopolitiques dans ces analyses : les problèmes des conflits internationaux, les problèmes démographiques, culturels, la famine et le commerce des drogues. Dans ce cadre, le facteur économique occupe la place essentielle. La plupart des auteurs le considère comme primordial dans l’approche géopolitique et ceux-ci créent une nouvelle discipline scientifique – la géo-économie. La tendance parallèle existe dans le domaine politico- militaire avec la géostratégie.

Le quatrième et dernier groupe – peu fourni – est constitué d’ouvrages encyclopédiques et cartographiques qui traitent de l’histoire de la géopolitique, de ses problèmes ontologiques, épistémologiques et théoriques. La matière et la réflexion scientifique de ces ouvrages sont très différentes. Parmi ces ouvrages, l’on peut distinguer deux attitudes. La première est la reconnaissance du statut scientifique de la géopolitique et de ses catégories méthodologiques et opérationnelles. La deuxième est la négation du statut scientifique de la géopolitique, en la qualifiant de « pseudoscience ». En ce qui concerne la fréquentation et la qualité de cette discussion, c’est l’école française qui domine. La discussion interne dans cette école a même abouti à la naissance au sein de l’école géopolitique française de quelques courants [2]. Depuis plusieurs années, on observe la croissance de l’importance de la géopolitique en Russie. Cela concerne tout d’abord l’espace eurasiatique. Les ouvrages publiés sont inspirés du géopoliticien russe le plus connu –Alexandre Dugin, très proche des conseillers du président Vladimir Poutine [3]. En revanche, on note moins d’intérêt pour la recherche ontologique, épistémologique et théorique parmi des chercheurs anglo-saxons qui sont concentrés sur les aspects pratiques de la pensée géopolitique.

Il est difficile ici de faire l’impasse sur le groupe ambitieux de l’école géopolitique polonaise contemporaine. D’abord, il nous faut rappeler l’ouvrage de Leszek Moczulski intitulé La géopolitique. La puissance dans le temps et l’espace paru en 1999 [4], et même de l’acquis antérieur de l’école polonaise de géopolitique [5]. A notre époque, le centre géopolitique le plus important est l’Institut Géopolitique de Częstochowa, fondé en 2007.

L’étude des ouvrages qui traitent de géopolitique présente une grande diversité de points de vue sur les problèmes de l’objet, du caractère distinctif et des méthodes de la géopolitique. C’est pourquoi on peut se poser une question : existe-t-il une qualité spécifique, fondamentale qui lie les ouvrages mentionnés ci-dessus ?

Nicholas Spykman proposait cette définition : « le champ d’activité politique particulier de la géopolitique est la politique étrangère. A l’aide des méthodes de cette analyse, la géopolitique peut utiliser des données géographiques – au sens le plus large – pour définir des comportements politiques qui permettent d’atteindre certains buts justifiés »

Pour répondre à cette question, il faut faire l’analyse des différentes définitions de la géopolitique contemporaine. Le créateur de la notion « géopolitique », Rudolf Kjellen, l’a définie comme « la science de l’Etat en tant qu’organisme géographique, tel qu’il se manifeste dans l’espace. L’Etat en tant que pays, en tant que territoire ou de manière plus significative en tant qu’empire » [6]. D’un autre côté, Karl Haushofer, le créateur de l’école allemande de géopolitique, l’a considérée comme la science ayant pour objet l’« activité politique dans un espace naturel » [7]. Avec un peu de malice, l’on peut dire que cette définition suggère qu’il existe de la place pour une autre activité politique dans un autre espace. A mon avis, parmi les auteurs classiques, Nicholas Spykman proposait la définition la plus précise. D’après lui « le champ d’activité politique particulier de la géopolitique est la politique étrangère. A l’aide des méthodes de cette analyse, la géopolitique peut utiliser des données géographiques – au sens le plus large – pour définir des comportements politiques qui permettent d’atteindre certains buts justifiés » [8]. Malheureusement, N. Spykman n’explique pas l’expression « certains buts justifiés ».

Les auteurs contemporains de livres sur la géopolitique compliquent encore l’objet de leurs recherches. Mentionnons le chercheur polonais Leszek Moczulski qui définit la géopolitique comme la discipline autonome qui utilise plusieurs sciences dérivées et qui se caractérise par « l’importance primordiale des catégories d’espace » et qui « s’occupe des systèmes changeants dans l’espace » [9]. En ce qui concerne la définition de l’objet de la géopolitique Yves Lacoste, le mentor de cette discipline en France, écrit que la géopolitique « désigne en fait tout ce qui concerne les rivalités de pouvoirs ou d’influences sur les territoires et populations qui y vivent : rivalités entre des pouvoirs politiques de toutes sortes – et pas seulement entre des Etats, mais aussi entre des mouvements politiques ou des groupes armés plus ou moins clandestins –, rivalités pour le contrôle ou la domination de territoires de grande ou de petite taille. Les raisonnements géopolitiques aident à mieux comprendre les causes de tel ou tel conflit, au sein d’un pays ou entre des Etats, mais aussi à envisager quelles peuvent être, par contre, les conséquences de ces luttes dans des pays plus ou moins éloignés et parfois même dans d’autres parties du monde » [10]. Pour Y. Lacoste, la géopolitique n’est pas encore de la science mais une démarche scientifique. Selon lui, le phénomène géopolitique stricto sensu n’est pas seulement les rivalités de pouvoirs sur le territoire, mais seulement celles d’entre elles « dont les représentations plus ou moins antagonistes sont désormais largement diffusées par les médias, ce qui suscite entre citoyens des débats politiques » [11]. La notion fondamentale de cette conception est « la représentation ». Il la comprend comme le système d’idées qui reflètent comment le groupe social, tout d’abord la nation, voit les ordres politique, religieux et autres, et quelle est la perception de ce groupe du lieu qui en résulte [12] . Une conception similaire – large – de l’objet de la géopolitique est présentée par Stéphane Rosière. Selon lui « l’analyse géopolitique s’intéresse (…) aux acteurs, aux enjeux qui motivent leur confrontation et aux dynamiques territoriales qui découlent de leur rivalité » [13]. Ces trois paradigmes – comme les appelle le géopoliticien français – forment les trois composantes nécessaires de tout raisonnement géopolitique. S. Rosière répartit l’espace géopolitique en trois niveaux : mondial, régional et local. Ainsi, dans sa conception, l’objet de la géopolitique constitue tant par la dynamique des relations entre les civilisations que par celle des luttes de gangs pour le « pouvoir » dans la ville. Cette opinion est caractéristique des auteurs qui développent la discipline nommée « micro-géopolitique ». Ces derniers s’opposent à la géopolitique classique, concentrée sur l’Etat, la construction de sa puissance ou bien sur la guerre. En revanche, l’objet de la micro-géopolitique est – selon ses partisans – les régions, les villes, les entreprises, les syndicats, les mafias etc. Ils expliquent cette position par la thèse que – comme l’écrit Philippe Moreau Defarges – « chacun des acteurs a une géopolitique. Situé dans l’espace et le temps, chacun, individu ou groupe, pense sa position, en déduit une ou des options et se confronte à d’autres démarches géopolitiques », alors, « désormais tout est géopolitique » [14].

L’auteur russe Alexandre Dugin (NDLR ou Douguine) présente une opinion similaire sur l’objet de la géopolitique. Selon lui, la géopolitique est « la perception du monde et c’est pourquoi il faut la considérer plus comme un système de sciences, non comme une science. Elle se trouve au même niveau que le marxisme, le libéralisme etc., c’est-à-dire un système d’interprétation de la société et de l’histoire. Ces systèmes utilisent un critère particulier comme principe fondamental et lui ajustent tous les aspects de la vie humaine et naturelle (…). La géographie et l’espace jouent un rôle dans la géopolitique, comme l’argent et les relations économiques dans le marxisme et le libéralisme (…). Ils emploient la géopolitique comme méthode d’interprétation du passé. Ils sont les facteurs principaux de la vie humaine et intègrent tous les autres domaines d’existence. A la manière des idéologies économiques, la géopolitique se base sur l’approximation, sur la réduction à quelques paramètres des diversités de la vie (…). Elle prouve son utilité dans l’explication du passé, son effectivité dans l’organisation du présent et la réalisation des projets du futur » [15].

La manière russe d’appréhender l’objet géopolitique est très proche de la manière américaine...

Dans un autre passage, il constate que la géopolitique est « la perception du monde par le pouvoir, c’est la science de l’Etat, et pour l’Etat » [16]. Cette dernière définition indique le courant principal de la géopolitique russe qui est centrée sur l’analyse des relations interétatiques, essentiellement sur les centres de pouvoirs dans ces relations. Cette approche est visible dans les manuels académiques du domaine géopolitique où ce dernier est traité d’une part comme la science de l’action et contre l’action des puissances dans la lutte pour le nouveau découpage du monde, et d’autre part comme la gestion des processus et de la circulation mondiaux des ressources vitales pour des Etats [17]. Il faut ajouter qu’une attention particulière est portée à l’analyse de la place de la Russie dans l’espace eurasiatique [18].

La manière russe d’appréhender l’objet géopolitique est très proche de la manière américaine, influencée par la pensée géopolitique de Nicholas Spykman. Au temps de la Guerre froide, les auteurs de cette école ont réduit le champ de recherche de la géopolitique – comme l’écrit Peter Taylor – « à la rivalité des superpuissances (système Est – Ouest) de domination sur les sphères périphériques (système Nord - Sud) » [19]. Une définition proche est proposée par le géopoliticien américain, Saul B. Cohen. « La nature de l’analyse géopolitique – écrit-il – est l’étude des relations qui existent entre la politique internationale de puissance et les traits géographiques correspondants » [20]. L’aspect de puissance est souligné aussi par le théoricien et praticien des relations internationales (il pensait à la force de frappe française) Pierre-Marie Gallois. Selon lui, « la géopolitique est l’étude des relations qui existent entre la conduite d’une politique de puissance portée sur le plan international et le cadre géographique dans lequel elle s’exerce » [21]. Voici une définition plus précise de la géopolitique proposée par Colin S. Gray : « peut-être que la géopolitique est du passé [c’est son opinion en 1977], mais les interprétations politiques de réalité géographique globale (…) jouent un rôle fondamental, souvent insaisissable, dans notre perception des problèmes politiques » [22]. Dans sa thèse, C.S. Gray indique de façon catégorique que la perception de la géopolitique est centrée sur l’Etat et « il ne peut pas analyser la politique étrangère et de défense sans la placer dans le cadre de la géopolitique » [23]. Le rôle de la géopolitique est souligné aussi par le chercheur polonais Roman Kuźniar (le conseiller officiel du président polonais Bronisław Komorowski). Il nie l’autonomie de la géopolitique comme science autonome, mais indique son utilité dans « l’interprétation de l’espace géographique comme objet de convoitise (contrôle, conquête, expansion etc.) de la politique d’un Etat ; le reste c’est un facteur géographique dans la politique ou c’est une géographie politique » [24]. Pascal Lorot, géopoliticien français, présente une opinion similaire en ce qui concerne l’autonomie de la géopolitique et souligne particulièrement le caractère conflictuel de l’objet de sa recherche. « La géopolitique – écrit-t-il – est une méthode particulière qui repère, identifie et analyse les phénomènes conflictuels, les stratégies offensives ou défensives centrées sur la possession d’un territoire » [25]. Cette méthode consiste à traiter l’objet de recherche « sous le triple regard des influences du milieu géographique, pris au sens physique comme humain, des arguments politiques des protagonistes du conflit, et des tendances lourdes et continuités de l’histoire » [26].

Les problèmes des relations mutuelles entre géopolitique et géographie politique donnent de l’embarras à tous les géopoliticiens. La cause de ces difficultés ne repose pas seulement sur les controverses concernant la définition de l’objet de la géopolitique. Un autre problème est – comme l’écrit Stanisław Otok, l’auteur de manuel académique le plus populaire pour la géographie politique en Pologne – que « l’on manque jusqu’à présent de définition commune de la géographie et, donc il n’existe pas de définition commune de la géographie politique (…). Cependant tout le monde accepte que le processus politique et l’espace sont les attributs de la géographie politique » [27]. Malheureusement, cet auteur ne présente pas la nature de la géographie politique et sa différence avec la géopolitique. C’est significatif de la recherche dans ce domaine. En effet – comme l’écrit un autre auteur polonais – « dans la géopolitique contemporaine, on aperçoit l’effacement des différences entre la géopolitique et la géographie politique » [28]. On aperçoit ce trait caractéristique chez les auteurs qui ont commencé leur carrière scientifique comme géographes. C’est le cas, entres autres, de Colin Flint. Il situe la géopolitique dans le cadre de la géographie humaine, qui n’a pas l’objet propre de l’investigation mais qui offre la perspective particulière d’une perception géographique des phénomènes sociaux. D’après lui, l’absence de ce point de vue rend impossible la compréhension de ces phénomènes [29]. Robert Harkavy voit le lien direct entre ces notions. Selon lui, « la géopolitique est la représentation cartographique des relations entre les nations concurrentes » [30]. Une opinion similaire est présentée par l’auteur anglais Klaus Dodds. Pour lui, la géopolitique est une visualisation du monde, elle fournit – à l’aide des cartes, des tableaux, des photographies – le nouveau mode de compréhension du monde et explique les notions géographiques utilisées en politique comme le « Tiers monde », le « rideau de fer » ou l’« axe du mal » [31]. Dans ce cadre de recherche, il faut noter le groupe de chercheurs français qui se spécialisent dans l’élaboration des atlas géopolitiques. Ces atlas ne décrivent pas seulement la réalité internationale mais l’interprètent aussi. Les partisans de cette approche géopolitique – un rôle central revient à Gérard Chaliand – remportent des succès scientifiques et développent le courant géographique dans la science française des relations internationales, à l’aide des techniques numériques et de leurs compétences scientifiques.

Parmi ceux qui essayent de trouver la frontière entre la géopolitique et la géographie politique se trouve Stéphane Rosière. A son avis, le trait différenciant la géopolitique et la géographie politique est le suivant : en géopolitique l’espace est l’enjeu dans la rivalité des acteurs alors qu’en géographie politique, l’espace est seulement « un cadre politique ». Et justement, la description et l’étude de ce cadre à toutes les échelles (mondiale, régionale et locale) sont une mission de la géographie politique [32].

Pour les géopoliticiens, la tâche la plus difficile est d’indiquer les liens mutuels entre la géopolitique et la science des relations internationales. D’autant plus que cette dernière n’est pas reconnue comme une science autonome. Les Anglo-saxons – connus pour leur pragmatisme – ne consacrent pas à ce problème beaucoup d’intérêt. Les auteurs du courant Geopolitics placent la géopolitique dans le cadre de l’étude sur les relations internationales (International Relations). La situation est similaire dans les principales écoles nationales en Europe.

L’absence de l’objet bien défini de la géopolitique n’empêche pas le processus d’émancipation de quelques branches géopolitiques. Un exemple de ce processus est la constitution dans les années 1990 de la géo-économie. L’objet de cette nouvelle discipline – écrit son fondateur en France, Pascal Lorot – « est l’analyse des stratégies d’ordre économique – notamment commerciales –, décidées par les Etats dans le cadre de politiques visant à protéger leur économie nationale ou certains pans bien identifiés de celle-ci, à acquérir la maîtrise de technologies clés et/ou conquérir certains segments du marché mondial relatifs à la production ou la commercialisation d’un produit ou d’une gamme de produits sensibles, en ce que leur possession ou leur contrôle confère à son détenteur – Etat ou entreprise « nationale » – un élément de puissance et de rayonnement international et concourt au renfermement de son potentiel économique et social » [33]. Selon plusieurs auteurs – y compris Edward Luttwak, l’un des fondateurs de cette discipline – l’avènement de la géo-économie marquerait la fin de la géopolitique. Cette opinion n’est pas générale. P. Lorot écrit que l’avènement de la géo-économie ne signifie pas la fin des conflits et des revendications territoriales dont s’occupe la géopolitique. La géo-économie de la même façon que la géopolitique – continue le chercheur français – est une méthode d’analyse et d’interprétation des rapports de force dans la vie internationale. Toutefois, il y a des différences fondamentales entre ces deux notions. La première, selon P. Lorot, « découle de ce que la géo-économie est avant tout le fait des Etats et des grandes entreprises à la stratégie mondiale, ce qui n’est pas le cas de la géopolitique » [34] puisque son champ d’observation est plus large et embrasse d’autres acteurs qui « participent à travers leurs actions à ces stratégies de conquête de territoires » [35]. Deuxième distinction, selon P. Lorot plus fondamentale, est le fait que « le but ultime des politiques géoéconomiques n’est pas le contrôle de territoires, il est d’acquérir la suprématie technologique et commerciale » [36].

Le problème des liens réciproques entre la géopolitique et la géostratégie est encore plus compliqué. C’est l’évolution de ces deux notions au cours du XXe siècle qui a introduit des difficultés. Actuellement, le concept de « géostratégie » s’utilise de façon interchangeable avec les notions suivantes : la polistratégie, la stratégie globale, la stratégie intégrale, la stratégie d’Etat, la grande stratégie, ainsi que l’approche stratégique. La notion de « géostratégie » est apparue pour la première fois en 1846. Son auteur est le général italien Giacomo Durando [37] qui a proposé deux façons de la comprendre. Dans la première, elle signifie l’influence des facteurs géographiques sur la création des groupes humains, dans la deuxième, c’est l’étude de l’influence des facteurs géographiques sur la conduite de la guerre. Cependant, jusque dans les années 1920, la stratégie et la géostratégie sont traitées comme une partie de stratégie générale militaire dirigée vers la conduite des opérations au niveau macro-géographique [38]. Puis cette notion est développée par l’Anglais Basil Lidell Hart, l’un des fondateurs de la stratégie moderne. Il a introduit le concept utilisé jusqu’à présent – surtout par l’école anglo-saxonne – de « grande stratégie » pour définir les activités dirigées vers la coordination et l’utilisation de toutes les ressources de la nation ou de la coalition pour atteindre les buts politiques de la guerre. L’évolution ultérieure de la géostratégie l’a éloignée de plus en plus de la « stratégie militaire » et l’a placée comme « la sœur cadette » de la géopolitique. Enfin, ce processus d’émancipation a conduit – surtout au sein de l’école américaine – à l’identification des notions de la géopolitique et celle de la géostratégie. C’est l’approche d’étude de Zbigniew Brzeziński [39] qui conçoit la géostratégie comme le produit de la fusion des solutions stratégiques et géopolitiques sans différenciation entre la géopolitique et la géostratégie. Suivant les traces de son maître américain, Roman Kuźniar propose la définition de géostratégie qui peut être considérée avec succès comme celle de la géopolitique. Ainsi « la grande stratégie » – comme il l’appelle – est composée des quelques traits et éléments suivants :

. c’est un ensemble intégral (au sens spatial et fonctionnel) ;

. elle est destinée au long terme, mais avec une perspective de temps définie ;

. elle se base sur l’analyse compétente de l’environnement d’un acteur ; cet acteur doit prendre en considération des circonstances et des facteurs favorables et défavorables pour la conduire ;

. elle est la structure rangée des buts et elle est construite par un acteur ; cet acteur doit prendre en considération les ressources, les instruments et les méthodes pour atteindre ces buts, ainsi que les possibilités de gagner des moyens au cours de la réalisation de cette stratégie ;

. elle doit être définie et réalisée par l’acteur politique le plus uniforme possible et intégral [40].

La définition présentée ci-dessus indique le caractère praxéologique de la géostratégie.
Paul Claval, de son côté, essaie de faire la différence entre les notions de géopolitique et de géostratégie. A son avis, « la géopolitique prend en compte l’ensemble des préoccupations des acteurs sur la scène internationale, qu’il s’agisse des hommes d’Etat, de la diplomatie, de l’armée, des organisations non gouvernementales ou de l’opinion publique. Elle s’interroge sur les calculs des uns et des autres et sur ce qui les pousse à agir. Elle se montre sensible à ce qui, dans les plans que forment les protagonistes, reflète l’hétérogénéité de l’espace : conditions naturelles, histoire, religion, diversité ethnique » [41]. Selon lui, la géostratégie a un objet d’investigation plus restreint. « Elle se penche sur les rapports de force et la logique des armes. L’espace sur lequel elle raisonne est celui des distances et des cheminements beaucoup plus que celui des enracinements et des rêves. Elle ne retient, comme hétérogénéités que celles qui favorisent ou gênent la manœuvre militaire et les actions logistiques qu’elle implique. La pensée géostratégique prend volontiers une forme théorique » [42]. En outre, Paul Claval considère que la géopolitique et la géostratégie appartiennent à la même famille des pratiques et qu’elles « sont réservées à d’étroites élites dirigeantes : princes et gouvernants, militaires, diplomates » [43].

Le géopoliticien italien Carlo Jean comprend la géopolitique de manière similaire à celle de la définition de la géostratégie de Paul Claval. La géopolitique est pour lui « la géographie du prince » [44]. Il nie sa valeur scientifique. « Il n’y a pas – écrit-il – des principes objectifs ou des lois géopolitiques. Ils n’existent que d’une façon subjective et servent à la pensée nationale géopolitique pour la création des hypothèses, des théories, des représentations des scénarios politiques. Ceux-ci à leur tour dépendent des intérêts, des technologies appropriées et du système de valeurs culturelles de celui qui les prépare » [45]. A partir de là, il définit la géopolitique comme « l’approche particulière de la politique, l’ensemble des principes et méthodes qui confèrent une forme des théories et des hypothèses géopolitiques, elle est la réflexion particulière (…) qui précède la décision politique » [46] et ajoutons – l’activité politique. Le rôle de la géopolitique – continue le chercheur italien – n’est pas limité à la description statique des positions géographiques de puissance politique, stratégique, économique dans une époque historique donnée – c’est une tâche de la géographie politique. En revanche, la géopolitique – écrit C. Jean – appréhende les intérêts et les buts de l’acteur politique concret, et elle doit ainsi servir à choisir la politique et la stratégie.

Pour C. Jean, les hypothèses géopolitiques occupent une place essentielle dans la définition de la géopolitique. Il s’agit d’étudier les « scénarios du futur possible et les solutions alternatives de ces formes en conformité avec nos buts, principes et valeurs » [47]. Selon lui, ces derniers sont subjectifs et artificiels et aucunement neutres puisqu’ils sont dépendants des systèmes de valeurs appropriées. Ces systèmes, à leur tour, inspirent un acteur qui construit l’hypothèse, l’aident à comprendre ses intérêts, sa perception de l’environnement, son « destin » et l’avenir du système international. Pour construire cette hypothèse, écrit Carlo Jean, il faut toujours rassembler trois éléments. Le premier est la nécessité d’analyser « les grandes tendances d’environnement ». Puis il faut définir les intérêts propres et les vérifier sous l’angle de la possibilité de les atteindre en prenant en considération les coûts et les gains. Le troisième élément est la nécessité de la conduite de l’action d’information et de propagande pour gagner ou renforcer l’appui interne et international [48]. Cette démarche rend possible la construction des hypothèses géopolitiques intégrales, c’est-à-dire où le facteur géographique est toujours présent, mais où il n’est pas l’élément autonome de l’analyse, il en est seulement un parmi d’autres. C. Jean justifie ce raisonnement par l’étymologie de la notion « géopolitique » de laquelle il déduit que la deuxième partie de cette notion « politique » est plus pesante que celle la première – « géo ». Cette argumentation conduit C. Jean à la thèse qu’il ne peut pas parler d’une géopolitique mais plutôt des géopolitiques qui sont liées avec les Etats [49].

Cette conduite de recherche du géopoliticien italien est très proche de mon opinion. L’histoire contemporaine prouve la validité de cette argumentation. L’accès à la souveraineté d’un nombre toujours plus grand d’Etats quelques dizaines d’années – et le progrès technique qui raccourcit la distance géographique – ont déterminé l’importance croissante de l’approche géopolitique à la fin du XX siècle. Les Etats sont en possession de traits spécifiques et uniques comme les unités géopolitiques. On peut les grouper en quatre points :

. les Etats sont les unités politiques fondamentales qui possèdent en même temps trois attributs : territoire, peuple et pouvoir souverain ; aucun autre acteur politique ne les possède ;

. l’appartenance étatique est absolue et – hors quelques exceptions – elle n’est pas résultante du choix ; pour les citoyens et groupes sociaux, les Etats constituent les formes institutionnelles de leur participation à la vie internationale et les Etats sont les médiateurs d’un processus d’articulation et de réalisation de leurs intérêts dans l’environnement international ;

. ils sont les plus importants acteurs et régulateurs des relations internationales en raison de leurs organisation, dynamisme et influence ;

. les relations interétatiques constituent l’essentiel des relations internationales et précèdent les relations entre celles d’autres acteurs de la vie internationale ; les Etats comme les acteurs uniques et souverains des relations internationales définissent les conditions normatives et matérielles de tous les autres domaines de la vie internationale.

Les traits spécifiques des Etats déterminent donc le fait que les Etats ont des possibilités de construire leurs visions géopolitiques.

Copyright Décembre 2014- Musiał/Diploweb.com

NDLR : La direction du Diploweb.com remercie Charlotte Bezamat-Mantes et Sylvie Blanchet pour leurs relectures.
Citation :

[1] Par exemple, l’édition universitaire française a publié le livre intitulé Géopolitique du goût : la guerre culinaire, Paris 2004 et en Espagne était édité La estetica geopolitica : cine y espacio en el sistema mundial, Barcelona 2003.

[2] Ibidem, p. 107–112.

[3] A. Dugin, op. cit. ; idem, Gieopolitika postmodiernizma. Vriemiena novyh impierij. Oczierki gieopolitiki XXI vieka, Моskva 2007. La revue des opinions d’auteurs russes sur le statut scientifique de la géopolitique : D. V. Jmurov, Probliemy nauschnovo statusa gieopolitiki, http://www.npocmo.info/evr7/evr7_in..., 26.07.2012. Dernièrement, la conception russe de l’espace eurasiatique a inspiré des géopolitologues allemands (W. Schneider-Deters, P.W. Schulze, H. Zimmermann (dir.), Die Europäische Union, Russland und Euroasien : Die Rückkehr der Geopolityk, Berlin 2008).

[4] L. Moczulski, Geopolityka. Potęga w czasie i przestrzeni, Warszawa 1999.

[5] P. Eberhardt, Twórcy polskiej geopolityki, Kraków 2006.

[6] R. Kjellen, Der Staat als Lebenform, Leipzig 1917, p. 46 ; por. M. Korinman, Quand l’Allemagne pensait le monde. Grandeur et décadence d’une géopolitique, Paris 1990, p. 152.

[7] M. Korinman, op. cit., p. 155.

[8] N.J. Spykman, The Geography of Peace, New York 1944 ; wyd. II, 1969, s. 5. Comme la preuve de sa confusion concernant la définition de la géopolitique en témoigne sa proposition de trois autres définitions de géopolitique (ibidem).

[9] L. Moczulski, op. cit., p. 70, 73.

[10] Y. Lacoste, Géopolitique. La longue histoire d’aujourd’hui, Paris 2006, p. 8.

[11] Idem, Dictionnaire de géopolitique, Paris 1995, s. 5 ; idem, Vive la nation, Destin d’une idée géopolitique, Paris 1997.

[12] Idem, Dictionnaire…, p. 24-29.

[13] S. Rosière, Géographie politique et géopolitique. Une grammaire de l’espace politique, Paris 2003, p. 21.

[14] Ph. Moreau Defarges, Dictionnaire de géopolitique, Paris 2002, p. 139.

[15] A. Dugin, Gieopolitika postmodiernizma …, op. cit., p. 12.

[16] Ibidem, p. 13.

[17] W. Diergaschev, Gieopolitika. Uschiebnik, Моskvа 2004. Au début des années 1990, la géopolitique est devenue une discipline académique. A partir de ces années ont paru quelques dizaines de manuels de géopolitique.

[18] A. Dugin, Gieopolitika postmodiernizma …, op. cit. ; D. Karrier, E. Ankos, op. cit. ; K. S. Kadjief, Gieopolitischieskije gorizonty Rosij. Kontury novogo miropariadka, Москва 2007.

[19] P.J. Taylor, Political Geography of the Twentieth Century : A Global Analysis, London 1993, p. 52 ; por L. Moczulski, op. cit., p. 72.

[20] S.B. Cohen, Geography and Politics in a World Divided, New York 1973, p. 24.

[21] P.M. Gallois, Géopolitique. Les voies de la puissance, Lausanne 2000, p 37.

[22] C.S. Gray, The Geopolitics of the Nuclear Era, New York 1977, p. 21.

[23] Ibidem, p. 19.

[24] R. Kuźniar, Globalizacja, geopolityka i polityka zagraniczna, Sprawy Międzynarodowe 2000, nr 1, p. 17.

[25] P. Lorot, Histoire de la Géopolitique, Paris 1995, p. 71.

[26] Ibidem.

[27] S. Otok, Geografia polityczna. Geopolityka – ekopolityka – globalistyka, Warszawa 2006, p. 7.

[28] Z. Rykiel, Podstawy geografii politycznej, Warszawa 2006, p. 33.

[29] C. Flint, Introduction to Geopolitics : Tensions, Conflicts and Resolutions, New York 2006, s. 1–2 ; P. Taylor, C. Flint, op. cit.

[30] R.H. Harkavy, Great Power Competition for Overseas Bases. The Geopolitics of Access Diplomacy, New York 1982, s. 272 ; por. P.M. Gallois, op. cit., p. 33.

[31] K. Dodds, Geopolitics : A Very Short Introduction, Oxford 2007, s. 4–5 ; idem, Geopolitics in a Changing World (Insights Into Human Geography), London 1999 ; M.R. Polelle, Raising Cartographic Consciousness : The Social and Foreign Policy Vision of Geopolitics in the Twentieth Century, Lanham 1999 ; E.W. Anderson, International Boundaries : A Geopolitical Atlas, Norwich 2003 ; J. Agnew, Geopolitics : Re-visioning World Politics, New York 2003. Visualisation des problèmes géopolitiques est la faiblesse de géopolitique anglo-saxonne cette phrase est à revoir mais je ne suis pas certaine d’en comprendre le sens. Généralement, elle utilise les ouvrages cartographiques français.

[32] S. Rosière, op. cit., p. 19-20.

[33] P. Lorot, La nouvelle grammaire des rivalités internationales, in : P. Lorot (dir.), Introduction à la géoéconomie, Economica, Paris 1999, p. 15.

[34] Ibidem, p. 18.

[35] Ibidem.

[36] Ibidem ; P. Lorot (dir.), Dictionnaire de la mondialisation, Paris 2001, p. 206–207.

[37] La notion de « stratégie » vient du mot grec « strategos » – le commandant d’armée, le verbe « strategem » signifiant « commander une armée ». Uneautre notion dérivée est « strategema » – le manœuvre de guerre, d’où le mot latin « stratogema » – la ruse de guerre.

[38] Actuellement, il y a aussi les auteurs qui limitent la géostratégie à sa signification militaire. Par exemple, Thierry de Montbrial écrit que la géostratégie est « la partie de la stratégie militaire concernant les situations où la géographie a une importance primordiale » (Th. de Montbrial, L’action et le système du monde, Paris 2002, p. 77).

[39] Z. Brzeziński, The Grand Chessboard : American Primacy and Its Geostrategic Imperatives, Basic Books, 1998.

[40] R. Kuźniar, Geostrategiczne uwarunkowania bezpieczeństwa Polski, « Sprawy Międzynarodowe », 1993, nr 1, p. 24.

[41] P. Claval, Géopolitique et géostratégie. La pensée politique, l’espace et le territoire au XXe siècle, Paris 1996, p.7.

[42] Ibidem, p. 7-8.

[43] Ibidem, p. 8.

[44] C. Jean, Geopolityka, Wrocław 2003, s. 39.

[45] Ibidem, p. 40.

[46] Ibidem, p. 41.

[47] Ibidem.

[48] Ibidem, p. 41–42.

[49] Ibidem, p. 38–39.
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MessageSujet: Re: La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées   La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées Icon_minitimeDim 28 Déc - 21:47

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MessageSujet: Re: La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées   La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées Icon_minitimeLun 29 Déc - 23:50

merci pour le lien
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MessageSujet: Re: La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées   La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées Icon_minitimeLun 5 Jan - 15:40

Citation :
La Russie et la Turquie face au piège de l'isolationnisme
La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées 1080064_la-russie-et-la-turquie-face-au-piege-de-lisolationnisme-web-tete-0204051319960_660x352p
La dérive autoritaire de Poutine et d'Erdogan entraîne leurs pays respectifs dans une spirale dangereuse. S'ils rêvent de retrouver leur grandeur en s'opposant à l'Europe, ni l'un ni l'autre n'ont les moyens de leurs ambitions.


La Russie et la Turquie sont-elles devenues « les deux hommes malades à la périphérie de l'Europe » ? Pendant des siècles, l'expansion territoriale de l'Empire russe s'est faite, entre autres, au détriment de l'Empire ottoman, décrit au XIXe siècle comme « l'homme malade de l'Europe ». Aujourd'hui ces deux anciens empires semblent connaître une évolution parallèle et négative qui s'explique en deux mots, ou plutôt en deux noms : Poutine et Erdogan. La cause de la « maladie » qui frappe la Russie comme la Turquie paraît simple en effet et tient à la dérive autoritaire et à la concentration excessive du pouvoir autour de ces deux hommes.

Alors que s'ouvre l'année 2015, le rapprochement entre Moscou et Ankara n'est pas en effet de nature diplomatique, même s'il existe des frémissements dans ce sens. La Turquie constitue toujours le pilier du flanc sud de l'Otan. La Russie s'indigne des manoeuvres de l'Ukraine pour se rapprocher de l'Otan. De même, sur le plan économique, les deux pays ne sauraient être plus différents. La Turquie, avec une démographie en pleine expansion, continue de faire preuve d'un dynamisme qui contraste fortement avec le déclin accéléré de ce géant énergétique aux pieds d'argile qu'est la Russie. Les sanctions occidentales, la baisse des prix du pétrole et du gaz ne sont que des révélateurs et des accélérateurs des faiblesses structurelles de l'économie russe.

En fait, le rapprochement entre les héritiers de l'Empire russe et de l'Empire ottoman est de nature politique et institutionnelle. Dans leur gestion toujours plus centralisée du pouvoir, dans leur volonté de tout contrôler et de ne pas tolérer la moindre critique, Poutine et Erdogan semblent comme désireux de se donner l'un à l'autre un certificat de bonne gestion politique : « Le monde extérieur nous ennuie avec ses critiques. Nous n'avons de conseil à recevoir de personne ! »

Poutine et Erdogan semblent de fait animés par un instinct, sinon des pulsions communes. Dans leur mélange de nationalisme, dans leur volonté de contrôler tous les rouages du pouvoir, qui les conduit à alterner les fonctions présidentielles et de Premier ministre, les deux hommes semblent traduire un mélange d'ambition personnelle et une certaine forme de nostalgie pour un temps qui n'existe plus et qui ne peut renaître. Ils peuvent bien se voir comme le « dernier tsar » ou le « dernier sultan », ils peuvent être animés par un rêve de « Grande Russie » ou celui de la reconstitution d'un espace « néo-ottoman », ils n'ont ni l'un ni l'autre les moyens de leurs ambitions. En réalité, ils sont en train de s'isoler personnellement à l'intérieur de leurs pays respectifs par des comportements toujours plus autoritaires. Et ils contribuent tous les deux à l'isolement de leurs pays sur la scène internationale. La Turquie et la Russie, en s'éloignant de l'Europe et de ses valeurs, font profondément fausse route. Le dynamisme de l'économie turque présuppose l'existence d'une société ouverte. Le « capitalisme pour les amis » de la Russie de Poutine commence à évoquer, au moins dans ses résultats, la décadence de l'URSS dans les années 1980.

Certes, l'Union européenne, par ses atermoiements, sinon sa mauvaise volonté délibérée, a plus que contribué à l'éloignement de la Turquie. Mais l'évolution personnelle d'Erdogan ne saurait être imputée aux seules réticences de l'Union et de ses principaux membres. De plus en plus, Erdogan semble comme animé par un agenda personnel. Là encore, Erdogan et Poutine sont très proches. Ce qui amène à se demander ce qui peut bien les arrêter dans le processus d'auto-isolement de leur personne et de leur pays, les deux termes étant devenus presque synonymes l'un de l'autre.

Seule la peur de perdre le pouvoir pourrait les conduire à une révision déchirante de leur comportement et de leurs priorités. Mais n'est-il pas déjà trop tard ? Entourés, comme isolés du monde réel, par des entourages de courtisans, Erdogan tout comme Poutine semblent prisonniers d'une forme de fuite en avant. Plus les critiques à leur égard se font vives plus ils se font autistes. Plus les conditions objectives sont difficiles, plus il leur semble important d'apparaître forts.

Poutine n'est pas Henri IV, pour qui « Paris vaut bien une messe ». Son objectif principal est de durer, ce qui dans son esprit veut dire, avant tout, ne pas céder, ni sur le fond ni sur la forme. Après tout, on n'a jamais autant parlé de la Russie et de son leader. La Russie peut bien mériter plus que jamais sa réputation de « puissance pauvre », elle n'en apparaît pas moins comme incontournable, au moins par sa valeur de nuisance, au moment où l'Amérique d'Obama est plutôt perçue comme une puissance autant inadéquate qu'indispensable.

La Turquie d'Erdogan n'est peut-être plus la démonstration qu'islam et démocratie, islam et modernité sont compatibles. Elle n'est plus ce qu'elle semblait être au début des révolutions arabes, c'est-à-dire un modèle. Mais elle demeure, non plus grâce à, mais en dépit d'Erdogan, un acteur clef de la scène moyen-orientale entre les ambitions rivales de l'Iran chiite et de l'Arabie saoudite sunnite.

La Russie et la Turquie peuvent bien être engagées dans un processus compétitif de dérive autoritaire, les cartes d'Ankara semblent objectivement meilleures que celles de Moscou. Est-ce une raison supplémentaire de craindre plus l'évolution de la Russie que celle de la Turquie ?

Dominique Moïsi
http://www.lesechos.fr/journal20150105/lec1_idees_et_debats/0204051157856-la-russie-et-la-turquie-face-au-piege-de-lisolationnisme-1080064.php#

Alors veritable analyse froide ou simple deduction de fait ?
L'avenir immediat nous le dira  !
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MessageSujet: Re: La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées   La géopolitique. Perceptions contemporaines et notions dérivées Icon_minitimeLun 5 Jan - 16:11

Merci pour l'article.

Sans vouloir préjuger de la qualité de la presse française, celle-ci (quand il s'agit de politique étrangère) est très peu encline à l'objectivité et est souvent caricaturale -voir à côté de la plaque-

Il y a de nombreux analystes d'excellente envergure qui y sont publiés, certes, mais ce n'est pas le cas de cet article. Il est plutôt dans la catégorie analyse de comptoir de bar que dans l'analyse encyclopédique.

Je trouve particulièrement malsain le point de vue qui dit "Poutine pas comme nous, Poutine méchant, Poutine dictateur, Poutine à éliminer". Ce sont ici des raccourcis très graves pour un journal qui se croit d'une objectivité exemplaire.

Bref. La mise en perspective stratégique du point de vue russe n'est absolument pas celle de la puissance pauvre -quelle caricature !- mais doit prendre racine dans l'adhésion des pays de l'Est, et particulièrement baltes, dans l'OTAN. Il s'agit ici de la violation d'un promesse verbale et non contraignante des USA et de l'Occident en général faite à Ieltsine à la chute de l'URSS.
S'ajoute à cela, le Kosovo, le démontage des installations d'écoute russes à Cuba avec une contrepartie non constructive des Américains qui n'ont pas démonté les installations en Norvège, révolutions de couleur à forte consonance russophobe jamais dénoncée en Occident (au contraire bien soutenue), encouragement et armement de la Géorgie, propagande d'une innouïe brutalité et mensongère en 2008 quand l'agression fut entamée par la Géorgie qui tua des Casques Bleus russes et enfin les Russes qui se sont sentis complètement roulés dans la farine avec l'intervention en Libye, autorisée par le Conseil de Sécurité de l'ONU (et qui a tourné en chasse à l'homme contre Kadhafi).
Je cite ici des éléments évidents et assez importants du point de vue géopolitiques et qui sont communément acceptés (il y en a tant d'autres, mais peu ou prou sujets à débats)

Tant qu'on n'aborde pas ces éléments point par point, on ne fera que de la caricature et non de l'analyse. Et malheureusement, la presse français, si elle ne publie pas de spécialiste (par exemple, les analystes de l'IFRI) tombe quoi qu'il arrive dans une caricature fausse. Voire sophique.

En sus, on ne peut pas dire que la Russie est isolée parce qu'elle ne parle pas à l'Occident, il y a toute une panoplie de pays qui travaillent très bien et étroitement avec la Russie (voir les accords récents avec l'Argentine et les SU-24, avec le Brésil, l'Inde, l'Indonésie, la Malaisie, l'Algérie, l'Afrique du Sud... pour ne citer que ceux là ). Mais il s'agit ici d'un nombrilisme occidental particulièrement puissant en France. Mais ceci est une autre histoire.

Bien à vous

PS. Et pour info, mis à part au niveau militaire et certaines interdictions d'accès au territoire, l'Ukraine n'a décrété aucune sanction économique contre la Russie.
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